À quelques mètres de l'aérodrome de Vannes-Meucon, des pilotes, amateurs
habitent le Mont air park. Chacune des six maisons du lotissement
possède un hangar, en guise de garage, pour abriter leur avion. Yves et Raymonde Pranal y ont atterri en 2001.
Certains des résidents en parlent comme d'un « petit paradis ». Ils
évitent l'exposition médiatique, de peur de susciter la jalousie. Six
couples habitent au « Mont air park » : l'abréviation de Monterblanc, à
quelques kilomètres de Vannes, et de Air park, village aéronautique en
anglais. Yves et Raymonde Pranal n'ont « rien à cacher ». Dans le garage
jouxtant leur pavillon : des vélos, du matériel de jardinage, d'anciens
meubles et... un avion ! « Il est toujours à côté de nous, glisse le
propriétaire. C'est presque une personne. » Un peu comme le petit
dernier de la famille qui n'aurait pas quitté le nid.
Sept ans pour le construire
Cet oiseau-là est un « canard ». « Sur ce type d'appareil, l'hélice est
placée à l'arrière », précise Yves Pranal, qui l'a patiemment conçu. «
Cela m'a pris sept ans ». Une fascination pour les avions partagée par
ses voisins. La plupart ont commencé par en construire un, avant même
leur maison au Mont air park. Un seul des occupants a changé depuis la
création, en 1999. C'est un Francilien, Bernard Canac, qui a lancé le
projet. Lors d'un voyage, ce consultant en entreprise découvre le
concept aux États-Unis, où, parfois, des habitants logent à des
centaines de kilomètres de leur lieu de travail. Sauf qu'en France, il
n'existait qu'un seul endroit où les maisons disposaient d'un hangar à
avion, à l'époque : le « Vendée air park », à Talmont-Saint-Hilaire,
près des Sables-d'Olonne. Bien loin du Morbihan où se trouve le «
terrain parfait pour créer le "Mont Air park" », selon l'instigateur.
Une jachère de 10 ha bordant l'aérodrome de Vannes-Meucon. Tout le monde me prenait pour un fou. Les autorités locales ont été
dures à convaincre », témoigne Bernard Canac. Mais pas les Pranal.
Lorsque ce dernier propose aux constructeurs d'avion canard de la région
parisienne de participer, le couple, qui habitait l'Essonne, fonce. «
Les conditions étaient idéales pour notre retraite : s'installer en bord
de mer avec une piste de décollage de 1.500 mètres de long à proximité
», raconte l'ancien ingénieur.
À l'époque, le Cosy, le petit nom de
l'avion, est inachevé, dans un hangar de l'aérodrome d'Étampes. « Pour
piloter, je devais réserver un créneau quinze jours ou trois semaines à
l'avance et rouler une trentaine de kilomètres jusqu'à l'aéroclub. »
Installé en Bretagne depuis 2001, le septuagénaire savoure « l'autonomie
complète » que lui confère le « Mont air park ». « Il n'y a plus que la
mauvaise météo qui m'empêche de voler. » Tout comme les « nuages bas »
qui bloquent la visibilité. Depuis son jardin, Yves Pranal a 300 mètres à
parcourir aux manettes de son engin pour rejoindre la piste par un
accès privé. « Nous sommes tellement proches que, parfois, des
parachutistes atterrissent dans le jardin », rigole Raymonde. Le « Mont
Air park » est séparé de l'aérodrome par une route à franchir. Les «
taxiways » qui serpentent entre les maisons ont été spécialement conçus
pour que les avions roulent dessus. « Je suis dans les airs en cinq
minutes, à une minute près », sourit le pilote.
En vacances avec leur propre avion
Golfe du Morbihan, île de Houat, Belle-Ile-en-Mer, Côte sauvage.... Les
anciens Franciliens décollent toutes les semaines pour profiter de la
vue, à 300 km/h. C'est même leur mode de transport préféré. « Il permet
d'aller vite et loin. » Cet été, le couple part en vacances au Touquet
(Pas-de-Calais), en avion, à plus de 2.000 mètres d'altitude. Pour eux, «
c'est une immense liberté ». Sans parler du plaisir que prend Yves
Pranal à « réparer et briquer » son Cosy à domicile. « On s'attache
beaucoup. » Fox Papa Charlie Oscar Zoulou, selon l'alphabet radio, a
encore de beaux jours devant lui.